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LA MENACE ISLAMISTE
Elle existe et elle pourrait mκme κtre potentiellement dangereuse. Depuis les annιes 1960 l'islamisme politique lιgal et organisι obtenait environ 15-16% des suffrages. Avant le coup d'Etat militaire de 1980, la formation islamiste du professeur Erbakan a mκme participι i des gouvernements de coalition dirigιs par M. Demirel. Si au cours des derniθres annιes ce courant a pu augmenter sensiblement son audience, au point de conquιrir plusieurs grandes villes du pays, cela est principalement dϋ aux consιquences multiformes de la guerre du Kurdistan. Celle-ci a notamment forcι 5 ΰ 6 millions de Kurdes ΰ quitter leurs terres pour aller s'entasser dans les bidonvilles misιrables des grandes mιtropoles turques ou dans ceux des villes kurdes comme Diyarbakir. Les fondations caritatives viennent en aide ΰ ces dιracines en dιtresse, hostiles au rιgime et ΰ ses partis traditionnels turcs de gauche ou de droite ayant tous soutenu l’armιe et sa terrible rιpression au Kurdistan. Dans un pays oω le vote est obligatoire et oω les partis pro-kurdes laοcs sont interdits une fraction substantielle de l’ιlectorat kurde sunnite a votι pour le Refah islamiste. Des Turcs marginalisιs par la grave crise sociale et ιconomique du pays, elle mκme consιquence du coϋt ιnorme de la guerre du Kurdistan, et choquιs par l'ιtalage ostentatoire de l'opulence d'une petite minoritι et par les scandales financiers ιnormes impliquant les deux partis de la coalition gouvernementale, le Premier ministre et nombre de ses ministres votent ιgalement de plus en plus pour le Refah qui promet "un ordre juste et propre" : A ces causes structurelles, il convient d'ajouter le soutien de l'armιe et du gouvernement aux activitιs islamistes dans les rιgions kurdes dans l'espoir d'enrayer aussi la progression du nationalisme kurde laοc. Ce fait, largement connu en Turquie, est aussi attestι par un rιcent rapport de la Commission des Affaires ιtrangθres du Sιnat amιricain dont des extraits ainsi que l'article d'un journaliste kιmaliste turc sur le r6le de l'armιe dans la propagation de l'islamisme sont reproduits dans la partie Documents de ce sujet. Tout en brandissant ΰ l'ιtranger le spectre de l'islamisme et se prιsentant comme "un rempart laοc" contre cette menace, Mme. Ciller ne dιdaigne pas de recevoir en tκte-ΰ-tκte les chefs des confrιries islamistes, ni mκme de flirter avec le Refah, comme en novembre 1995 pour l'ιlaboration d'une loi ιlectorale favorisant les grands partis. Enfin le slogan "Turquie, unique Etat laοc du monde musulman" est un grossier argument de propagande. Sans chercher loin, Ankara doit se souvenir que deux de ses voisins musulmans, l'Irak et la Syrie, sont aussi des Etats laοcs ! La laοcitι sans la dιmocratie est-elle vraiment un progrθs ? L'intιgrisme nationaliste est-il moins dangereux pour la paix et la stabilitι que l'intιgrisme religieux ?
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